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La Dre Isabelle Leboeuf, psychologue travaillant à Lille, en France, estime que l’une des questions les plus importantes que nous devons nous poser lorsque nous travaillons en psychothérapie est : « faire ou être ? »

Pour se sortir de notre habitude à se concentrer uniquement sur nos actions (le « faire ») et pouvoir se mettre dans un état d’esprit qui accorde plus de place à ce que nous sommes (l’« être »), Leboeuf explique que nous devons disposer d’un certain espace mental, d’une « lenteur consciente » et d’un sentiment de se sentir connecté aux autres. Nous devons également aborder nos défis avec un sentiment de curiosité et la confiance que les réponses que nous cherchons se trouveront en nous-mêmes.

À quoi ressemblent « être » et « faire » ? Comment cela peut-il être expliqué ? C’est ce que tente de démontrer le Dr. Paul Gilbert, fondateur de la Thérapie fondée sur la compassion, dans son exercice expérientiel La découverte guidée. Dans cet exercice, nous sommes invités à imaginer deux manières d’accompagner un groupe d’individus lors d’une sortie de randonnée en forêt.

Dans la première approche, un guide accompagne un groupe dans une forêt. Il incite les gens à admirer la beauté qui les entoure : « Regardez ce champignon ! et ne manquez pas cette orchidée ! », leur dit le chef de groupe. « Voici les traces d’un renard ! Et ce ruisseau coule jusqu’au lac en bas ! Regardez ceci, et cela, et cela là-bas ! », poursuit l’accompagnateur de la sortie.  Le simple fait d’imaginer cette surcharge d’informations pourrait vous donner le vertige. « Cette excursion était censée être relaxante ?! » pourrait-on penser.

Dans la deuxième approche, Gilbert explique que le guide emmène un groupe au même endroit, dans la même forêt. Ils s’arrêtent et regardent autour d’eux en silence. Au bout d’un certain temps, le guide leur demande : « Que voyez-vous ? » Ils s’arrêtent à nouveau et commencent à partager et à écouter les autres. « Que voyez-vous ? » demande le guide un peu plus tard. Les moments de partage et d’écoute mutuelle se poursuivent alors qu’ils observent et explorent les alentours. « Que voyez-vous ? », demande le guide une dernière fois.

Je ne peux m’empêcher de penser qu’à moins d’avoir besoin d’écrire un article de botanique pour un travail d’école à mon retour, je préférerais être dans le deuxième groupe, surtout si l’une des raisons pour lesquelles je partais en randonnée était de me détendre et de prendre une pause de l’agitation de la vie urbaine. La découverte guidée est l’une des façons dont Gilbert ouvre son atelier expérientiel de L’Entrainement à l’esprit de la compassion. Vu sous l’angle du « faire ou être », on s’aperçoit que le premier groupe était plutôt axé sur le « faire », tandis que le second était plus axé sur l’ « être ». Dans le premier groupe, le guide était l’expert tandis que dans le second, le guide agissait plutôt comme un compagnon de l’expérience des gens. Ce que nous remarquons, ce que nous apprenons, la manière dont nous nous connectons à notre environnement et à ceux qui nous entourent ont plus à voir avec notre capacité à « être » qu’à « faire ».

En psychothérapie, nous pouvons voir que le « faire » et l’ « être » font tous deux partie de notre travail. Par exemple, les situations de traumatisme ou de perte d’un être cher défient notre sécurité et bouleversent notre vie personnelle, tant de manière concrète qu’en regard au sens qu’on y donne et à notre raison d’être. Quiconque a perdu un être cher attestera qu’il y a beaucoup de « faire » autour de l’organisation d’une cérémonie funéraire et beaucoup de choses qui doivent être « faites » (et parfois dans de courts délais) quand quelqu’un que nous aimons décède ou est en fin de vie. Éviter le « faire » pour privilégier uniquement l’« être » dans de telles situations serait un non-sens, car il est évident que les deux sont nécessaires pour traverser ces moments difficiles. « Faire » implique la mise en œuvre de stratégies de sécurité alors que nous sommes menacés. « Être » vise à explorer et à rétablir un sentiment de sérénité et de connexion, pour retrouver du sens à notre vie.

Le rôle du thérapeute, explique Leboeuf, implique un équilibre délicat entre « faire » et « être » : quand se concentrer sur quoi ; comment ne pas sacrifier l’un au profit de l’autre ; comment utiliser notre expertise en tant que professionnels tout en respectant le fait qu’en fin de compte, les gens sont les experts d’eux-mêmes. C’est un peu comme un pendule se déplaçant lentement d’un côté à l’autre, entre le « faire » et l’« être », dans une séquence répétée.

   Être, ensuite faire.                Faire, puis être.

    « Que voyez-vous? »              « Ne manquez pas cette orchidée! »                           

                                                                         

références

 (1) Gilbert, P. (2010). Compassion Focused Therapy, Distinctive Features. New York: Routledge.

 (2) Gilbert, P.; Choden (2013). Mindful Compassion, How the Science of Compassion Can Help You Understand your Emotions, Live in the Present, and Connect Deeply with Others. Oakland: New Harbinger Publications Inc.

3) Sites web de Isabelle Leboeuf:

https://joycompassion.org/author/isabelleclemencemarieleboeuf/

https://joiecompassion.com/author/isabelleclemencemarieleboeuf/